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بوركينا فاسو

BF003-j

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Tribunal de grande instance de Ouagadougou, Jugement du 18 février 2015, RG 326 du 10 avril 2014

Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou

Jugement du 18 février 2015, RG 326 du 10 avril 2014

K. L. I.

c/

S. J. S. L.

Le Tribunal,

Suivant exploit d’huissier de justice en date 28 mars 2014, K. L. I., Journaliste-Ecrivain, de nationalité burkinabè, demeurant à Ouagadougou, pour lequel domicile est élu en l’Etude de Maître M. K., Avocat à la Cour, 01 BP 5649 Ouagadougou 01, a servi assignation à S. J. S. L., Administrateur civil, Journaliste, Cinéaste de nationalité burkinabè, demeurant à Ouagadougou, 09 BP 1254 Ouagadougou 09, à l’effet de :

- S’entendre déclarer recevable en son action ;

- S’entendre déclarer auteur de l’œuvre « Salomon le sage » ;

- S’entendre condamner par conséquent S. J. S. L. à lui payer la somme de cent millions (100 000 000) de francs au titre des dommages et intérêts ;

- S’entendre ordonner à S. J. S. L., la cessation des violations de ses droits sous astreinte de cinq cent mille (500 000) francs par jour de retard ;

- S’entendre condamner S. J. S. L. à lui payer la somme de cinq cent mille (500 000) francs au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

- S’entendre, ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

- S’entendre enfin, condamner S. J. S. L. aux dépens ;

Au soutien de ses prétentions, K. L. I. expose que le 1er juin 2011, O. L., en sa qualité de Directeur de la RTB/Radio et S. J. S. L., en sa qualité de metteur en scène, le sollicitaient pour l’écriture d’une œuvre dramatique pour la rentrée RTB 2011-2012 ;

Que l’œuvre devrait avoir pour thème, la crise sociopolitique survenue au cours de l’année 2011 au Burkina Faso ; K. L. I. explique, qu’après expression de son talent, il a donné naissance à une pièce de théâtre intitulée « Salomon le sage » ;

Qu’aux termes de l’article 2 viii de l’Annexe VII de l’accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977, instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, il ressort que : « l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre » ;

Qu’ainsi, en tant que personne physique et créateur de la pièce de théâtre « Salomon le Sage », il en est de manière irréfragable l’auteur ; K. L. I. souligne que suite à la saisine du Bureau Burkinabè du Droit d’Auteur (BBDA), dans le cadre d’un litige l’opposant à S. J. S. L., ce dernier reconnaissait expressément sa qualité d’auteur à l’égard de la pièce de théâtre suscitée, suivant procès-verbal en date du 16 octobre 2012, dont pièce est versée au dossier ;

Que par la suite, S. J. S. L. dénonçait unilatéralement cet accord, suivant correspondance datée du 15 novembre 2012, mais à lui transmise par courriel, courant le mois d’avril 2013 ; Il affirme qu’au regard des dispositions de l’article 2 viii de l’Annexe VII portant révision de l’accord de Bangui précité, sa qualité d’auteur ne saurait être remise en cause ;

Qu’il plaira donc au Tribunal de dire, que du seul fait de sa création, il jouit sur son œuvre, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, appelé Droit d’Auteur ; K. L. I., poursuit en expliquant que l’œuvre « Salomon le sage » suivant l’autorisation de son auteur, en l’occurrence sa propre personne, a été mise en scène par S. J. S. L., en vue d’être représentée durant les festivités de la rentrée RTB 2011-2012, par la troupe théâtrale de la Radio ;

Que cette autorisation de représentation ne valait que pour les seules festivités de la rentrée télévisuelle RTB 2011-2012 ;

Que nonobstant cela, l’œuvre a fait l’objet de plusieurs représentations par S. J. S. L., sans l’autorisation préalable de l’auteur ; Que suivant les dispositions de l’article 57 alinéa 1 de la loi n°032-99/AN portant protection de la propriété littéraire et artistique cependant : « le contrat de représentation est conclu pour une durée limitée ou pour un nombre déterminé de représentation ou exécution » ;

Qu’ainsi, en entreprenant sans autorisation préalable, des représentations de l’œuvre au-delà de ce qui lui avait été autorisé, S. J. S. L., suivant les dispositions de l’article 57 alinéa 1 susvisé, s’est rendu coupable de contrefaçon de l’œuvre « Salomon le sage » ;

Qu’il plaira donc au Tribunal de dire que S. J. S. L. est coupable de contrefaçon de l’œuvre « Salomon le sage » ; K. L. I. explique en outre que lors de la représentation de l’œuvre, légalement autorisée par l’auteur, en date du 06 novembre 2011 au CENASA, dans le cadre des festivités de la rentrée télévisuelle RTB 2011-2012, S. J. S. L. a fait figurer, sans consentement de l’auteur, en fin de pièce, des personnages qui sont absents de l’œuvre originale ;

Qu’après cette représentation, il s’est empressé de déposer pour protection au BBDA, une version de l’œuvre « Salomon le sage » de S. J. S. L. d’après « Salomon le sage » de K. L. I. ;

Que toujours à l’insu de l’auteur, il a donné l’autorisation à un scénariste de cinéma, de transformer la pièce « Salomon le sage », en scénario/ciné ; Il argue que l’article 8 iii de l’accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle prescrit le respect de l’œuvre de l’auteur en disposant qu’il a le droit « de s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de son œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre qui seraient préjudiciables à son honneur ou sa réputation » ;

Qu’en rajoutant des personnages à l’œuvre d’origine sans son consentement d’une part et en déposant une œuvre dont il n’en est pas l’auteur d’autre part, S. J. S. L., porte atteinte à ses droits moraux ;

Que ce préjudice mérite réparation ; K. L. I. poursuivant toujours ses explications, soutient que S. J. S. L., lors de la représentation de la pièce aux festivités de la rentrée télévisuelle RTB 2011-2012, l’a utilisée à des fins lucratives notamment en sollicitant de l’argent auprès de certaines autorités ;

Qu’ainsi celui-ci a inscrit l’œuvre sans en informer au préalable l’auteur à un festival ; qu’il a reçu, à l’insu de l’auteur un soutien financier du Premier Ministre pour avoir initié un projet de « journées de sensibilisation à la citoyenneté » au cours desquelles la pièce « Salomon le sage » devait être représentée dans plusieurs localités du Burkina Faso ; que S. J. S. L. a demandé et reçu du BBDA, en août 2012, un prêt d’un montant de un million cent trente-sept mille (1 137 000) francs, pour une résidence de création en théâtre destinée à préparer une représentation sur scène de la pièce « Salomon le sage » ; Il soutient qu’au regard des dispositions de l’article 9 v et vi de l’accord révisé de Bangui : « …l’auteur d’une œuvre a notamment le droit exclusif de faire ou d’autoriser les actes suivants : représenter ou exécuter son œuvre en public ; communiquer son œuvre (y compris la représenter ou l’exécuter) par radio diffusion (ou rediffusion) ou par télévision ; (…) » ;

Que les dispositions de l’article 16 de la loi de 1999 abondent dans le même sens en faisant valoir que : « L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur son œuvre de droits patrimoniaux exclusifs dont les prérogatives lui permettent de faire ou d’autoriser : la représentation ou l’exécution de son œuvre en public ; la communication de son œuvre au public… » ;

Qu’il n’est pas intervenu de contrat de représentation, ni aucune autre forme d’autorisation de représentation, entre S. J. S. L. et lui après le 06 novembre 2011, date de la représentation autorisée par l’auteur ;

Que les représentations et communications ultérieures, n’ayant pas été autorisées, elles contreviennent aux dispositions des articles 9 et 16 suscités et constituent du même coup une violation de ses droits patrimoniaux ; K. L. I. soutient en outre que des dispositions de l’article 63.1 alinéa 1er de l’accord révisé de Bangui, les titulaires de droits : « dont un droit reconnu a été violé, ont le droit d’obtenir le paiement, par l’auteur de la violation, de dommage-intérêts en réparation du préjudice subi par elles en conséquence de l’acte de violation, ainsi que le paiement des frais occasionnés par l’acte de violation, y compris les frais de justice » ;

Qu’ainsi S. J. S. L. s’est rendu responsable de violation de ses droits reconnus, en sa qualité d’auteur de l’œuvre ; que ces violations lui portent un préjudice sans pareil ;

Que S. J. S. L. s’expose par conséquent au paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’il a subi, nonobstant le paiement des frais occasionnés par les actes de violation ; K. L. I. conclut en faisant valoir que l’article 63.4 de l’Accord révisé de Bangui commande que : « lorsque le danger existe, que des actes constituant une violation se poursuivent, le tribunal ordonne expressément la cessation de ces actes. Il fixe en outre un montant à verser à titre d’astreinte » ; qu’ainsi en se faisant passer pour l’auteur de l’œuvre, le comportement de S. J. S. L. est de nature à constituer un danger présent et futur pour ses droits d’auteur, d’où donc il sollicite que le tribunal lui interdise toute reproduction et exploitation de son œuvre, sous quelque forme que ce soit, sans son autorisation expresse et cela sous astreinte de cinq cent mille (500 000) FCFA par jour de retard ;

Qu’enfin la mauvaise foi de S. J. S. L. étant manifeste, qu’il n’hésitera pas en cas de condamnation, à faire usage des voies de recours à lui offertes dans un but purement dilatoire ;

Que pour briser cette résistance, il serait juste d’ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ; Qu’au regard de tout ce qui précède, le tribunal fera droit à l’ensemble de ses réclamations ;

En réplique, S. J. S. L. expose à son tour que l’article 2 du chapitre premier du titre I du même accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 stipule en ses points suivants que : « iv) une œuvre de collaboration est une œuvre dans la création de laquelle ont concouru deux ou plusieurs auteurs. v) est dite collective, l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui la divulgue sous la direction et sous son nom, et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se font dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun un droit distinct sur l’ensemble réalisé. vi) une œuvre composite est une nouvelle qui incorpore une œuvre existante et qui est réalisé sans la collaboration de cette dernière. » ;

Que de ce qui précède, il est donné de constater que l’accord de Bangui ne stipule nulle part qu’il faille que les différents collaborateurs soient « aptes à indiquer chacun leur part de contribution à l’œuvre collective » ;

Que pour mieux comprendre la situation qui l’oppose à K. L. I., il convient de se référer plus précisément au point v susmentionné, qui correspond au cas d’espèce qui les oppose ; S. J. S. L. explique que pour permettre au Tribunal de trancher la conscience tranquille, il est en mesure d’indiquer sa « part de contribution à l’œuvre collective » ;

Que pour ce faire, il verse au dossier les deux versions de la pièce de théâtre « Salomon le sage », déposées l’une par K. L. I. et l’autre par lui-même, auprès du BBDA ;

Que ces deux œuvres se distinguent sur les plans suivants : Que premièrement le nombre de pages que comptent chacune des deux versions suffit à convaincre ; que la version de K. L. I. comporte 37 pages et sa version 43 pages ;

Qu’en second lieu, il y a le contenu ; qu’ainsi pendant que la version de K. L. I. est conçue avec le personnage principal, Salomon le sage visible, ordinaire et présent sur scène, dans sa version modifiée, c’est un personnage mystérieux, invisible aux yeux des humains ;

Qu’en outre la version de K. L. I. comporte douze (12) personnages, tandis que sa version en comporte dix-neuf (19) ;

Que par ailleurs la version de K. L. I. n’a pas prévu de personnage féminin, alors que sa version, pour faire plus vrai a remplacé quelques personnages, prévus par la première version masculine, par des personnages féminins ;

Qu’enfin, il a renforcé, certains propos du personnage Salomon le sage ;

S. J. S. L. déclare qu’au regard de tout ce qui précède et qui prouve que la pièce de théâtre Salomon le sage, mise en scène à l’occasion de la rentrée RTB 2011-2012 est bien de K. L. I. et de lui et cela conformément aux textes en vigueur, qu’il propose que la carrière de cette version de la pièce de théâtre Salomon le sage, contestée par l’auteur de l’œuvre originale, se limite à la rentrée RTB 2011-2012 et à la suite de la dizaine de diffusions sur les antennes de la RTB ; Que si sa proposition est retenue par le Tribunal et ce d’autant plus que K. L. I., n’aime pas sa version de la pièce de théâtre Salomon le sage et préfère de loin la sienne, qu’il prend l’engagement de ne plus exploiter cette version de la pièce de théâtre Salomon le sage et souhaite qu’il en soit de même pour K. L. I. ; S. J. S. L. fait savoir d’une part, que concernant l’allégation de K. L. I. et suivant laquelle il aurait permis à un cinéaste d’adapter la pièce de théâtre Salomon le sage au cinéma, il réclame la fourniture de preuve, faute de quoi, il se verra dans l’obligation de le poursuivre pour diffamation, dans la mesure où son honneur et sa probité ont été mis en cause ;

Que d’autre part, pour ce qui est de l’allégation suivant laquelle, il ne serait pas un auteur, qu’il espère que c’est par ignorance et que par conséquent, il l’en excuse ;

Que s’il est vrai qu’en matière de production audiovisuelle et parce qu’il excelle déjà quelque peu comme producteur, metteur en scène, réalisateur et comédien de théâtre et de cinéma, il ne privilégie pas effectivement l’écriture où excellent déjà d’autres compatriotes, parmi lesquels il souhaite que K. L. I. figure, […] qu’il a plutôt tendance à encourager et promouvoir les auteurs, en produisant et en mettant en scène, leurs œuvres au théâtre et en adaptant et produisant leurs œuvres au cinéma ;

Que des voix autorisées au niveau national ont reconnu ses compétences et ses mérites dans ce sens ;

K. L. I. dans ses conclusions en duplique du 13 août 2014 fait valoir, qu’il ne saurait y avoir une œuvre qui dérive de l’œuvre originale de « Salomon le sage », sans son autorisation expresse et sans la contrefaire ;

 Qu’ensuite aux termes de l’article 2 iv de l’Annexe VII de l’accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 : « une œuvre de collaboration est une œuvre dans la création de laquelle ont concouru deux ou plusieurs auteurs » ;

Que selon donc les termes de l’article susvisé, il est indispensable que chacun des co-auteurs ait un rôle créatif original ;

Que les termes dudit article induisent que l’œuvre de collaboration n’existe que si les différents collaborateurs sont aptes à indiquer chacun leur part contributive à la création de l’œuvre ;

Qu’en l’espèce S. J. S. L. ne peut indiquer au Tribunal sa part contributive à la création de l’œuvre et que d’ailleurs, il n’est pas un écrivain ;

Que l’œuvre « Salomon le sage » a été créée par lui seul ;

 Que surabondamment, par procès-verbal de conciliation en date du 16 octobre 2012, établi par le BBDA, S. J. S. L. et lui-même, avaient convenu que c’était lui l’auteur de l’œuvre « Salomon le sage », S. J. S. L. étant le metteur en scène pour la rentrée RTB 2011-2012 et que l’œuvre n’avait jamais été adaptée ;

Que le Tribunal constatera par conséquent que S. J. S. L. ne peut revendiquer la qualité de co-auteur de l’œuvre « Salomon le sage », ni aucune autre qualité sur l’œuvre et de le débouter de tous ses moyens et demandes comme étant mal fondés ;

Le dossier appelé à l’audience du 23 avril 2014 a été renvoyé à la mise en état ; le 14 novembre 2014, le juge de la mise en état rendait une ordonnance de clôture et de renvoi du dossier à l’audience du 26 novembre 2014 ; à cette date le dossier a été renvoyé à l’audience du 10 décembre 2014, pour vérification des pièces de la procédure ;

Advenu à cette date, le dossier a été retenu et débattu, puis mis en délibéré pour décision être rendue à l’audience du 07 janvier 2015 ; à cette date, le délibéré a été prorogé au 04 février 2015, puis au 18 février 2015 ; parvenu à cette dernière date, le délibéré a été vidé ainsi qu’il suit :EN LA FORME

Attendu que l’action de K. L. I. a été introduite dans les délais et forme exigés par la loi ; qu’il y a lieu par conséquent de le déclarer recevable en son action ;

AU FOND

Sur l’attribution de la qualité d’auteur

Attendu qu’aux termes de l’article 2 viii de l’Annexe VII de l’accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977, instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, il ressort que : « l’auteur est la personne physique qui a créé l’œuvre » ;

Attendu qu’en l’espèce K. L. I. soutient qu’il est l’unique auteur de l’œuvre « Salomon le sage » ;

Que S. J. S. L. conteste cette allégation et argue que ladite œuvre est une œuvre de collaboration ; qu’il en est le coauteur ;

Attendu qu’il résulte des pièces versées au dossier qu’il est constant que K. L. I. a écrit une première version de l’œuvre : « Salomon le sage » ; Que S. J. S. L. reconnait qu’il a apporté des modifications à ladite version en l’absence de toute concertation avec K. L. I. ;

Attendu que selon les dispositions de l’article 2 du chapitre premier du titre I du même accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 on parle de coauteurs lorsque l’œuvre a été créé par deux ou plusieurs auteurs qui ont mis en commun leur inspiration en se concertant ;

Attendu qu’en l’espèce, il ressort que l’œuvre : « Salomon le sage » dans sa version originale a été créé uniquement par K. L. I. et ce sans aucune participation de S. J. S. L. ;

Qu’en conséquence de ce qui précède, il convient de déclarer K. L. I. auteur de ladite œuvre ;

Sur la violation des droits d’auteurs

Sur la violation du droit au respect

Attendu que selon les termes de l’article 8 iii de l’accord portant révision de l’accord de Bangui du 02 mars 1977 instituant une organisation africaine de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre dispose d’un droit au respect de son œuvre et de ce fait il a le droit de s’opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de son œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre qui seraient préjudiciables à son honneur ou sa réputation ;

Attendu qu’en l’espèce K. L. I. soutient que S. J. S. L. a porté atteinte à son œuvre en rajoutant lors des différentes représentations des personnages à l’œuvre d’origine sans son consentement ;

Attendu que des pièces versées au dossier il est constant que S. J. S. L. a procédé à une modification de l’œuvre en cause ;

Que pour cette modification l’auteur n’a pas donné son consentement ;

Qu’entre autres suite à cette modification ladite œuvre est passée de 37 pages à 43 pages ;

Que le nombre de personnages est passé de 12 à 19 ; qu’aussi celui-ci a fait figurer dans l’œuvre des personnages féminins ;

Attendu que le droit au respect implique que S. J. S. L. devait faire une représentation stricte de ladite œuvre ;

Qu’il ne pouvait apporter des modifications sans le consentement de l’auteur ; Qu’ainsi donc de ce qui précède, il y a lieu de dire que S. J. S. L. a porté atteinte au droit au respect de l’œuvre de K. L. I. ;

Sur la violation du droit à la représentation

Attendu que l’article 57 alinéa 1 de la loi n°032-99/AN portant protection de la propriété littéraire et artistique dispose que : « le contrat de représentation est conclu pour une durée limitée ou pour un nombre déterminé de représentation ou exécution » ;

Attendu qu’en l’espèce K. L. I. soutient que S. J. S. L. a porté atteinte à son droit de représentation ;

Qu’en effet celui-ci après le 06 novembre 2011 a continué de faire des représentations de son œuvre sans son consentement préalable ;

Attendu qu’en l’espèce K. L. I. a autorisé S. J. S. L. à mettre en scène son œuvre : « Salomon le sage » uniquement lors des festivités de la rentrée télévisuelle RTB 2011-2012 ; qu’ainsi donc le droit de représentation était limité ;

Attendu que S. J. S. L. a continué sans avoir au préalable obtenu l’accord de l’auteur à faire des représentations de l’œuvre litigieuse ;

Que K. L. I. n’a pas expressément consenti à la continuation de la représentation de son œuvre au-delà des festivités de ladite rentrée ;

Qu’ainsi donc S. J. S. L. en poursuivant ladite représentation a porté atteinte à son droit de représentation ;

Attendu que selon l’article 63.4 de l’Accord révisé de Bangui dispose que : « lorsque le danger existe, que des actes constituant une violation se poursuivent, le tribunal ordonne expressément la cessation de ces actes. Il fixe en outre un montant à verser à titre d’astreinte » ;

Attendu qu’en l’espèce S. J. S. L. se comporte comme étant l’auteur de l’œuvre litigieuse ; qu’il a modifié l’œuvre en cause à sa guise et a continué de faire des représentations ;

Qu’il convient donc d’ordonner à S. J. S. L. de cesser toutes violations des droits de K. L. I. relatives à l’œuvre en cause ;

Des dommages et intérêts

Attendu que selon l’article 63.1 alinéa 1er de l’accord révisé de Bangui, les titulaires de droits : « dont un droit reconnu a été violé, ont le droit d’obtenir le paiement, par l’auteur de la violation, de dommage-intérêts en réparation du préjudice subi par eux en conséquence de l’acte de violation, ainsi que le paiement des frais occasionnés par l’acte de violation, y compris les frais de justice » ;

Attendu qu’en l’espèce K. L. I. sollicite la condamnation de S. J. S. L. à lui payer la somme de cent millions (100 000 000) de francs CFA à titre de dommages et intérêts ;

Qu’il expose que S. J. S. L. a violé les droits qui lui sont reconnus en sa qualité d’auteur ;

Que cette violation lui cause préjudice ;

Attendu qu’il est établi que S. J. S. L. a porté atteinte au droit de respect et de représentation reconnu à K. L. I.;

Que cette violation lui porte préjudice ; Qu’ainsi donc la réclamation des frais de réparation est fondée en son principe ;

Attendu que cependant, le montant de cent millions (100.000.000) francs CFA réclamé par K. L. I. est excessif ;

Que la condamnation de S. J. S. L. à lui payer la somme de dix millions (10.000.000) francs CFA est une juste réparation ;

Qu’il convient en conséquence de débouter K. L. I. du surplus de sa demande de dommages et intérêts ;

SUR L’EXECUTION PROVISOIRE

Attendu que selon les articles 401 et suivants du code de procédure civile, le tribunal peut ordonner l’exécution provisoire de sa décision lorsque celle-ci n’est pas exécutoire de plein droit ;

Attendu que K. L. I. sollicite du tribunal, qu’il assortisse le présent jugement de l’exécution provisoire ;

Attendu qu’il est incontestable que K. L. I. ne peut jouir pleinement et en toute quiétude de ses droits d’auteur sur l’œuvre litigeuse si S. J. S. L. peut continuer à leur porter atteinte ; que dès lors, il échet d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement ;

SUR LES DEPENS

Attendu que selon l’article 394 du code de procédure civile la partie qui succombe à une instance doit être condamnée aux dépens ; Que S. J. S. L. a succombé à la présente instance ; Qu’il sied la condamner aux entiers dépens ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort ;

Déclare K. L. I. recevable en son action ;

Le déclare auteur de l’œuvre « Salomon le sage » ;

Ordonne la cessation de la violation de ses droits concernant l’œuvre en cause ; - Condamne S. J. S. L. à lui payer la somme de dix millions (10 000 000) de francs au titre des dommages et intérêts ;

Le déboute du surplus de ses réclamations ;

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision ;

Met les dépens à la charge de S. J. S. L.