Tribunal de Grande Instance du Wouri (Douala)
Jugement civil N°886/civ du 05 Décembre 2016
FOREST STEWARDSHIP COUNCIL
c/
STE BORIS BOIS SARL
Le Tribunal,
Attendu que suivant exploit en date du 19 avril 2016 de Me EMBOLO
René, Huissier de Justice à Douala, enregistré le 11 mai 2016 sous le N°1051,
vol.005 folio.311. Quittance N°24990688, aux droits de quatre mille francs CFA,
FOREST STEWARDSHIP COUNCIL, a fait donner assignation à la Société BORIS BOIS
SARL, d’avoir à se trouver et comparaître devant le Tribunal de Grande Instance
du Wouri statuant en matière civile pour, est-il dit dans l’exploit :
Enjoindre cette dernière de supprimer l’utilisation par quelque
moyen que ce soit, sur quelque support que ce soit, y compris sur leur site
Web, sur leurs produits ou services les marques enregistrées appartenant à la
FOREST STEWARDSHIP COUNCIL sous astreintes de 1 000 000 francs par
jour de retard et infraction constatée ;
Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir
nonobstant toute voie de recours ;
Condamner la Société BORIS BOIS SARL aux dépens ;
Attendu qu’au soutien de son action, la demanderesse a exposé que
les références juridiques de la mesure sollicitée se trouvent dans l’article 7
de l’Annexe III de l’accord de Bangui révisé (A.B.R), droits conférés par
l’enregistrement :
1) L’enregistrement de la marque confère à son titulaire le droit
exclusif d’utiliser la marque ou un signe lui ressemblant, pour les produits ou
services pour lesquels elle a été enregistrée, ainsi que pour les produits ou
services similaires ;
2) L’enregistrement de la marque confère également au titulaire le
droit exclusif d’empêcher tous les tiers agissant sans son consentement de
faire usage au cours d’opérations commerciales de signes identiques ou
similaires pour des produits ou services qui sont similaires à ceux pour
lesquels la marque de produits ou de services est enregistrée dans le cas où un
tel usage entraînerait un risque de confusion. En cas d’usage d’un signe
identique pour des produits et services identiques, un risque de confusion sera
présumé exister ;
Que selon l’article 47 de l’Annexe III de l’Accord de Bangui
(A.B.R) : « les actions civiles relatives aux marques sont portées
devant les tribunaux civils et jugées comme matières sommaires » ;
Que selon l’article 48 de l’Annexe III de l’Accord de Bangui
révisé (A.B.R) alinéa 1 : « le propriétaire d’une marque ou le
titulaire d’un droit exclusif d’usage peut faire procéder, par tout
huissier..., à la description détaillée, avec ou sans saisie des produits ou
services qu’il prétend marqués, livrés ou fournis à son préjudice en violation
des dispositions de la présente annexe en vertu d’une ordonnance du Président
du Tribunal Civil dans le ressort duquel les opérations doivent être
effectuées... » alinéa 2 : « l’ordonnance est rendue sur simple
requête et sur justificatif de l’enregistrement de la marque » ;
Qu’au vu de l’ordonnance aux fins de description détaillée d’une
contrefaçon N°302 du 29 mars 2016 signée par Monsieur le Président du Tribunal
de Première Instance de Douala-Bonanjo et du procès-verbal de description
détaillée du 08 avril 2016 du ministère de Me EMBOLO René, Huissier de Justice
à Douala, l’organisation non gouvernemental internationale FOREST STEWARDSHIP
COUNCIL, dont l’objet est de promouvoir une gestion responsable des forêts et
des produits fauniques dans le monde, est titulaire à l’OAPI des marques
ci-après :
-
FSC(Words) N°68284 en classe de produits 16, 19, 20 et 31 ;
-
FSC + LOGO N°68286 en classe de produits 16, 19, 20 et 31 ;
-
FSC(Words) N°68287 en classe de produits 35, 40 et 42 ;
-
FSC + LOGO N°68289 en classe de produits 35, 40 et 42 ;
Que les certificats d’identité de non-radiation et les
attestations de non déchéance desdites marques indiquent qu’elles sont
actuellement en vigueur à l’OAPI (Pièces)
Que conformément aux dispositions de l’article 7 de l’Annexe III
de l’Accord de Bangui, l’enregistrement de la marque confère à son titulaire le
droit exclusif :
- d’utiliser la marque, ou un signe lui ressemblant, pour les
produits ou services pour lesquels elle a été enregistrée, ainsi que pour les
produits ou services similaires ;
- d’empêcher tous les tiers agissant sans consentement de faire
usage au cours d’opérations commerciales de signes identiques ou similaires
pour des produits ou services qui sont similaires à ceux pour lesquels la
marque de produits ou de services est enregistrée dans le cas où un tel usage entrainerait
un risque de confusion. En cas de produits et services identiques, un risque de
confusion sera présumé exister ;
Que conformément aux dispositions de l’article 7 de l’Annexe III
de l’Accord de Bangui ci-dessus, SEUL le titulaire de la marque déposée en
l’occurrence FOREST STEWARDSHIP COUNCIL, dispose d’un droit privatif et d’une
exclusivité de conférer l’usage à des tiers par le biais d’autorisation
expresse ou sous concession d’un contrat de licence ;
Que depuis quelques temps, la requérante a constaté que ses
marques de produit et de service FSC + LOGO N° 68286 et FSC + LOGO N° 68289
figurent sur la page Web d’accueil de la société BORIS BOIS dont le siège
social est à Douala boulevard de la République BP : 1654 comme le démontre
à suffisance la copie ci-dessous de la dite image de sa page d’accueil web du
site : www.borisbois.net à côté d’autres logos ;
Qu’il apparaît clairement que les deux signes sont similaires, la
société BORIS BOIS ayant copié sans ménagement la marque de produits et de services
de la FOREST STEWARDSHIP COUNCIL sur sa page web ;
Qu’en droit positif, le titulaire d’une marque enregistrée dispose
de l’action en contrefaçon contre tous ceux qui l’utilisent ou l’imitent de
bonne ou de mauvaise foi, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit,
pour désigner à des fins de concurrence économique, des produits ou services
identiques ou similaires à ceux précédemment visés dans l’acte de dépôt ;
Qu’une jurisprudence constante définit la contrefaçon comme une
imitation illicite ou frauduleuse une reproduction servile ou quasi servile de
la marque d’autrui ou une violation du contrat de licence ou une exploitation
sans licence de la marque d’autrui ;
Qu’en l’espèce, il appert de la description détaillée par Me
EMBOLO René, Huissier de Justice à Douala, de la page d’accueil de la société
BORIS BOIS que les marques FSC déposées pour les produits et services N°68286
et 68289 ont été reproduites à côté d’autres signes par ladite société pour
laisser croire qu’elle a reçu l’aval de FOREST STEWARDSHIP COUNCIL en matière
de gestion responsable des forêts d’où sont recueillis le bois par elle
commercialisé (Pièce procès-verbal de constat de description d’une
contrefaçon) ;
Que la société BORIS BOIS inscrit en dessous de la marque querellée
la phrase « La marque de la gestion forestière responsable » alors
même qu’elle n’a jamais subi l’inspection de l’ONG requérante pouvant témoigner
ou attester de la manière par laquelle elle gère les forêts desquelles les bois
et autres dérivés qu’elle mettrait sur le marché ont été obtenus ;
Qu’il s’agit sans conteste d’une contrefaçon assortie d’une
volonté de tromper le public sur la qualité et l’origine bienveillante des
produits et services commercialisés par BORIS BOIS ;
Qu’il s’évince sans ambigüité de cette analyse une volonté
d’usurpation par la société BORIS BOIS des efforts de l’ONG responsable de
toutes les forêts du monde afin que les produits mis sur le marché avec ses
signes témoignent de la gestion responsable des exploitants ;
- Qu’en apposant les marques FSC + LOGO sur ses documents et sur
sa page d’accueil internet, la société BORIS BOIS trompe le public avisé sur
une qualification que ses produits auraient reçue de la FOREST STEWARDSHIP
COUNCIL alors que cela est faux ;
- Attendu que seule la demanderesse comparaît ;
- Qu’il échet de statuer contradictoirement à son égard et par
défaut à l’égard de la défenderesse ;
- Attendu que cette action a été faite dans les forme et délai
légaux ;
- Qu’il échet de la recevoir ;
- Attendu qu’il ressort des pièces du dossier des éléments de
preuves suffisants que la défenderesse a illégalement utilisé des sigles de la
demanderesse sur ses produits de manière à créer une confusion dans l’esprit du
public ;
- Que son refus de comparaître devant le Tribunal de céans achève
de démontrer qu’elle ne dispose pas d’arguments contraires sérieux à
opposer ;
Qu’il échet de faire droit à l’action de la demanderesse ;
Attendu que pour vaincre une éventuelle résistance à l’exécution
de la présente décision, il y a lieu de l’assortir d’astreintes ;
Attendu qu’aucune preuve de l’urgence de la mesure n’a été
rapportée ;
Qu’il n’y a pas lieu à exécution provisoire ;
Attendu que la partie qui succombe au procès en supporte les
dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de la
demanderesse, et par défaut à l’égard de la défenderesse en premier ressort et
en matière civile, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Reçoit la demanderesse en son action ;
L’y dit fondée ;
Enjoint la défenderesse de supprimer l’utilisation par quelque
moyen que ce soit et sur quelque support que ce soit, y compris les moyens de
technologie moderne de communication, les marques appartenant à la
demanderesse ;
Soumet pour l’exécution de cette injonction, la défenderesse à
astreintes de 25.000 FCFA par jour de retard à compter de la signification de
la présente décision ;
Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire ;
Condamne la défenderesse aux dépens.